samedi 6 septembre 2008

Expulsée de son logement, une mère de famille se suicide

Pour 11 600 euros de loyers impayés, doit-on expulser une famille avec des enfants ? " La question est posée par François Bernardini, maire (div. g.) d'Istres (Bouches-du-Rhône), au lendemain du suicide d'une mère de trois enfants. A l'arrivée d'un huissier, d'un officier de police judiciaire et d'un déménageur venus procéder à son expulsion, Morgane S., 33 ans, s'est défenestrée, mardi 2 septembre, sans avoir échangé un seul mot. De l'organisme HLM au sous-préfet, on s'accorde à reconnaître que toutes les procédures d'aide sociale avaient été tentées en faveur de cette famille qui, depuis son installation dans un T4 de la cité Rassuen 2, en octobre 2006, n'avait pas réglé un seul loyer (500 euros mensuels). Le bail avait, à l'origine, été souscrit par Morgane S. et son compagnon.

"La conscience tranquille", Bernard Escalle, directeur général de l'Opac sud, assure avoir "fait tout ce qu'il fallait faire" pour éviter cette expulsion, avant et depuis le jugement du tribunal d'instance de Martigues, rendu le 27 novembre 2007. "Les assistantes sociales du CCAS d'Istres, nos conseillères économiques et sociales ont réalisé le maximum mais toutes se sont heurtées à un mur ". En février, la salariée de l'Opac se serait vu refuser l'entrée de l'appartement. Une convocation avait alors été laissée, puis une seconde en juillet. Raymond Le Deun, le sous-préfet d'Istres qui a accordé le recours à la force publique pour l'expulsion, dresse un même constat amer. "Tous les dispositifs d'aide qui peuvent aller jusqu'à l'effacement de la dette par le Fonds de solidarité logement deviennent inopérants lorsque les gens n'adhèrent pas ". Pour le représentant de l'Etat, ce suicide tient plus "du drame d'une personne isolée, coupée du monde que du drame de l'expulsion locative".

Un travailleur social juge pourtant que la procédure est allée trop vite, car "deux ans pour faire le tour de la situation d'une personne en difficulté, c'est court". Morgane S. semble s'être peu à peu marginalisée puisque la Caisse d'allocations familiales l'avait radiée. Ebranlée par ce suicide, Christelle Nicolas, assistante sociale du CCAS d'Istres avait été chargée d'une enquête sociale dans le cadre de l'assignation devant la justice. Elle avait reçu la jeune femme en août 2007 pour évoquer un plan d'apurement des impayés, éventuellement une procédure de redressement personnel. Un premier entretien qui s'était "bien passé" mais auquel Morgane S. n'avait pas donné suite alors que des documents lui avaient été réclamés. Les relances, les tentatives de contact – y compris par l'intermédiaire de ses enfants - étaient demeurées sans suite. "Ce dont je suis sûre, a déclaré Christelle Nicolas, c'est que j'ai fait tout ce que je devais faire, et même plus. Mais aucune des perches tendues n'a été saisie". Les enfants présents au moment du drame ont été confiés à leur père.

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